Mars 2017

Actualités juridiques – Mars 2017

 

L’ESSENTIEL – À la suite d’un refus d’autopsie sur une patiente décédée, son époux a saisi la juridiction administrative. Débouté en première instance et en appel, il a formé un pourvoi devant le Conseil d’État. Ce dernier conclut à l’illégalité de la décision de refus opposé par le directeur du centre hospitalier : « aucune disposition, et notamment pas l’article L. 6211-1 du Code la santé publique, ne subordonne la réalisation d’une telle autopsie à l’existence, au sein de l’établissement, d’un service d’anatomopathologie ou même à la présence de praticiens possédant des compétences particulières ». Il en résulte que le directeur, qui doit uniquement « déterminer si l’autopsie médicale prescrite pouvait ou non être réalisée au sein de l’établissement ne pouvait rejeter la demande de l’intéressé au motif que le transport du corps vers un autre établissement de santé en vue d’y faire pratiquer une autopsie médicale n’était plus légalement possible ». En effet, les opérations de transport du corps en vue de l’autopsie doivent être réalisées sous un délai maximal de 48 heures après la survenance du décès.

POUR APPROFONDIR – A. D., « Autopsie d’une décision illégale de refus d’autopsie », Semaine juridique édition Administrations et Collectivités territoriales, 10 avril 2017, n° 14 ; Jean-Marc Pastor, « Refus d’un hôpital de pratiquer une autopsie médicale », AJDA 2017, p. 716.

L’ESSENTIEL – Dans cette affaire la Cour de cassation distingue clairement deux types de préjudices susceptibles d’être subis par les proches d’une victime. Certains préjudices sont subis par les proches « dans leur propre corps » et sont réparés dans le cadre du déficit fonctionnel permanent. D’autres résultent « du rapport à l’autre » et sont évalués au titre du préjudice d’affection. Ainsi, la cour d’appel n’a pas indemnisé deux fois le préjudice en distinguant, d’une part, « le syndrome dépressif ayant nécessité un suivi très régulier par un psychiatre » qui constituent des souffrances personnellement endurées par le proche et, d’autre part, le manque ressenti en raison de la disparition de la victime qui constitue un sentiment. Si cet arrêt relatif à un assassinat ne semble pas concerner directement les aidants, la distinction qu’il pose pourrait les intéresser, par exemple en cas de faute médicale ayant entraîné le décès de la personne aidée.

L’ESSENTIEL – Si les aidants apportent un soutien indispensable à leurs proches au cours de leur vie, ils peuvent néanmoins être confrontés à des difficultés lors du décès de la personne aidée. Il n’est pas rare que des conflits émergent quant à la détermination du lieu et au mode de sépulture du défunt. La Cour de cassation a rappelé que les juges du fond déterminent souverainement la personne la plus qualifiée pour décider de l’organisation des obsèques. En l’espèce, « la défunte ne disposait pas d’attache à Lunéville, autre que celle de son époux, âgé de 78 ans, qu’elle avait vécu la majeure partie de son existence à Madagascar, où elle s’était mariée et où ses filles résidaient, et qu’elle n’avait pas renoncé aux coutumes malgaches pour son enterrement, sa mère, originaire de ce pays, était la personne la mieux qualifiée pour organiser ses funérailles à Lunéville ».

POUR APPROFONDIR – Gilles Raoul-Cormeil, « Détermination du lieu de la sépulture et des modalités funéraires », L’essentiel Droit de la famille et des personnes, 2017, n° 5, p. 3.

L’ESSENTIEL – Le Code du travail comporte des dispositions particulières applicables aux seuls départements de la Moselle, du Bas-Rhin et du Haut-Rhin. Certaines sont susceptibles d’intéresser les proches aidants. C’est le cas de l’article L. 1226-23 du Code du travail. Aux termes de ce texte, « le salarié dont le contrat de travail est suspendu pour une cause personnelle indépendante de sa volonté et pour une durée relativement sans importance a droit au maintien de son salaire ». La Cour de cassation a eu l’occasion de préciser la portée de cette disposition dans un arrêt du 15 mars 2017. En l’espère, une salariée s’était absentée durant dix jours de son travail pour demeurer au chevet de son concubin. Elle avait saisi le Conseil de prud’hommes afin d’obtenir, sur le fondement de l’article L. 1226-23, un rappel de salaire et de congé payés correspondant à la durée de son absence. Le juge prud’homal ayant fait droit à sa demande, l’employeur a formé un pourvoi en cassation. La Haute juridiction rejette le pourvoi. Elle considère que le Conseil de prud’hommes a légalement justifié sa décision en constatant, d’une part, que la salariée avait été absente « seulement dix jours » et, d’autre part, qu’un certificat établi par le médecin traitant attestait de l’état de santé du concubin nécessitant sa présence indispensable à son chevet.

POUR APPROFONDIR – « Alsace-Moselle : condition du maintien du salaire du salarié absent », JCP S 2017, n°12, Actualités, 96 ; Julie Belloeil, « Maintien du salaire en cas d’absence du salarié », Semaine juridique édition Sociale, 16 mai 2017, 1160.

L’ESSENTIEL – Pris en l’application de l’article 6 de la loi n° 2015-1776 du 28 décembre 2015 relative à l’adaptation de la société au vieillissement, ce décret autorise la création de traitements de données et d’échanges d’informations afin de prévenir la perte d’autonomie. Ce dispositif permettra aux organismes de sécurité sociale (CARSAT, CNAVTS et CGSS) de proposer des services adaptés aux assurés sociaux exposés à un risque de perte d’autonomie précoce.

POUR APPROFONDIR – « Nouveau décret sur la prévention de la perte d’autonomie des personnes âgées », Dr. fam., mai 2017, Alertes, n° 39.

L’ESSENTIEL – À la suite du décès d’un assuré, la Carsat a engagé une action en recouvrement à l’encontre de ses héritiers afin d’obtenir le remboursement de l’allocation supplémentaire du Fonds national de solidarité. Amenée à se prononcer sur le délai de prescription, la Cour de cassation retient que, selon l’article L. 815-12 du Code de la sécurité sociale dans sa rédaction antérieure à la loi du 24 juin 2004, « l’action en recouvrement sur la succession du bénéficiaire de l’allocation supplémentaire ouverte à la caisse de sécurité sociale se prescrit par cinq ans à compter de l’enregistrement d’un écrit ou d’une déclaration mentionnant exactement la date et le lieu du décès du défunt ainsi que le nom et l’adresse d’au moins un des ayants droit ». Or, en l’espèce, le tribunal n’avait pas respecté cette règle en concluant à la prescription de l’action sur le fondement d’un certificat d’hérédité qui n’avait pourtant pas été enregistré.

L’ESSENTIEL – Dans l’affaire « Marwa », l’hôpital a fait appel de l’ordonnance rendue par le Tribunal administratif de Marseille (voir notre newsletter de février 2017). Le Conseil d’État confirme la décision des juges du fond. Il retient, d’une part, que le délai pour évaluer de manière certaine les conséquences des lésions neurologiques n’était pas suffisamment important. D’autre part, les juges rappellent le caractère prééminent de la volonté du patient dans l’appréciation de la notion d’ « obstination déraisonnable ». Cette volonté ne pouvant être exprimée – l’enfant ayant en l’espèce moins d’un an –, l’opposition conjointe des parents à l’arrêt des soins était primordiale.

POUR APPROFONDIR – Annick Batteur, « Fin de vie du jeune enfant », L’essentiel Droit de la famille et des personnes, 2017, n° 4, p. 4 ; Amélie Dionisi-Peyrusse, « Actualité de la bioéthique », AJ famille, 2017, p. 218 ; M. T.-D., « Confirmation en référé liberté de l’injonction de maintien des soins : oui à l’espoir de vie », Semaine juridique édition Administrations et Collectivités territoriales, 27 mars 2017, n° 12 ; Aude Mirkovic, « Patient polyhandicapé et obstination déraisonnable », Dr. fam., mai 2017, Commentaires, n° 114.

L’ESSENTIEL – Dans cette affaire, un tutélaire est autorisé par le juge des tutelles à rédiger un testament. Après son décès, une de ses filles conteste cette autorisation. Elle invoquait notamment l’existence d’une obligation pour le juge des tutelles de rechercher et de vérifier l’intention de tester de son père. La Cour de cassation écarte cet argument. Elle rappelle qu’il n’incombe pas au juge des tutelles, à l’occasion de la demande d’autorisation dont il est saisi, d’examiner le contenu du testament établi par le majeur protégé. En effet, il doit uniquement s’assurer que ce dernier est en capacité d’exprimer clairement sa volonté quant à ses dispositions testamentaires et que le projet de testament correspond à ses souhaits.

POUR APPROFONDIR – Ingrid Maria, « Quel(s) pouvoir(s) a le juge des tutelles sollicité pour l’autorisation d’un acte personnel ? », Dr. fam., mai 2017, Commentaires, n° 109 ; Gilles Raoul-Cormeil, « Rôle du juge des tutelles qui autorise une personne en tutelle à rédiger son testament », AJ Famille 2017, p. 250 ; Gilles Raoul-Cormeil, « Testament de la personne en tutelle et régime de l’autorisation du juge », L’essentiel Droit de la famille et des personnes, 2017, n°4, p. 5.

L’ESSENTIEL – Un majeur placé en curatelle renforcée a saisi le juge des tutelles d’une demande d’autorisation à conclure un pacte civil de solidarité. La Cour d’appel avait rejeté cette demande au motif que les intéressés avaient déclaré que le lien les unissant était celui d’un père à son fils en raison de leur écart d’âge de quarante-quatre ans. Au visa des articles 515-1 et 515-2 du Code civil, la Cour casse l’arrêt. En l’espèce, les juges du fond avaient bien constaté, d’une part, l’existence d’une vie commune de vingt-quatre ans et, d’autre part, l’absence de tout empêchement légal à la conclusion d’un pacs. Il en résulte que les conditions posées par les textes susmentionnés étaient remplies.

POUR APPROFONDIR – Ingrid Maria, « Quel(s) pouvoir(s) a le juge des tutelles sollicité pour l’autorisation d’un acte personnel ? », Dr. fam., mai 2017, Commentaires, n° 109 ; Annick Batteur, « Conclusion d’un pacs par un majeur sous curatelle et différence d’âge entre partenaires », L’essentiel Droit de la famille et des personnes, 2017, n°4, p. 6.

  • Don de congés et négociation collective – « Négocier sur : le don de jours de repos », Liaisons sociales Quotidien, Le dossier convention collective, 8 mars 2017, n° 46.

L’ESSENTIEL – La loi « Mathys » a posé un cadre légal pour le don de jours de repos aux parents d’enfants malades (C. trav., art. L. 1225-65-1). Plusieurs accords d’entreprise intègrent aujourd’hui de tels dispositifs, parfois en les élargissant aux conjoints et ascendants. L’article offre un panel d’exemples de ces clauses conventionnelles. Il constitue dès lors un outil mobilisable par les entreprises souhaitant renforcer les droits des aidants.

L’ESSENTIEL – Amenée à se prononcer sur la prescription d’une action en nullité d’une donation pour insanité d’esprit, la Cour de cassation a rappelé que le délai de cinq ans courrait à compter du décès du disposant. Notons que cet arrêt a été rendu sur le fondement de l’article 1304 du Code civil, dans sa rédaction antérieure à la loi du 5 mars 2007, applicable à l’espèce.

  • Contention et prise en charge psychiatrique – Cour d’appel de Versailles, 24 octobre 2016, n° 16/07393.

L’ESSENTIEL – Cette affaire concerne des pratiques de contention et d’isolement auxquelles sont susceptibles d’être confrontés les proches aidants de patients admis en soins psychiatriques. Rappelons que l’article 72 de la loi de modernisation de notre système de santé est venu encadrer, dans un article L. 3222-5-1 du Code de la santé publique, le recours à ces pratiques dans le domaine psychiatrique. Elles ne doivent être utilisées qu’en « dernier recours » pour prévenir un « dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui ». La décision relève d’un psychiatre. Elle ne peut être prise que pour une durée limitée et est soumise à une surveillance stricte. En l’espèce, la cour d’appel de Versailles a dû se prononcer sur une demande présentée par les parents d’une personne transférée dans une unité pour malades difficiles en raison d’un état paranoïde chronique. Elle prononce la mainlevée de la mesure d’hospitalisation complète. En effet, l’établissement n’était pas en mesure d’apporter la preuve que la mise à l’isolement « résult(ait) bien d’une décision d’un psychiatre » et qu’elle était « nécessaire » pour prévenir le dommage « immédiat ou imminent » visé par le Code de la santé publique. L’auteur souligne que le même raisonnement pourrait être tenu en matière de prise en charge des personnes âgées dépendantes. Signalons, en outre, la diffusion d’une instruction ministérielle relative à la mise en œuvre de la politique de réduction des pratiques d’isolement et de contention au sein des établissements de santé mentale (29 mars 2017, NOR : AFSH1710003J).

POUR APPROFONDIR – Paul Veron, « Observation sous Cour d’appel de Versailles, 24 octobre 2016, n° 16/07393 », RDSS, 2017, p. 175 ; Diane Poupeau, « Santé mentale : une instruction encadre le recours à l’isolement », AJDA, 2017, p. 775.

  • Bilan de la loi du 5 mars 2007 – Nathalie Baillon-Wirtz, Jacques Combret, « La réforme de la protection juridique des majeurs du 5 mars 2007 a dix ans : quel bilan ? », La semaine juridique, édition notariale et immobilière, 3 mars 2017, n° 9, p. 19.

L’ESSENTIEL – Dix ans après l’adoption de la loi du 5 mars 2007, les auteurs se proposent d’en établir le bilan. Ils rappellent d’abord les principaux apports de la réforme (sauvegarde de justice, pluralité de tuteurs ou de curateurs, mandat de protection future…) tout en soulignant les limites du dispositif, notamment en ce qui concerne la publicité des mesures. Ils soulignent ensuite la responsabilité des différents acteurs dans la mise en œuvre défaillante de la loi, laquelle n’est que faiblement compensée par l’adoption de mesures disparates.

L’ESSENTIEL – Le Conseil d’État a accepté de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité relative aux articles L. 1110-5-1, L. 1110-5-2 et L. 1111-4 du Code de la santé publique. L’association requérante soutenait que « ces dispositions, en ce qu’elles laissent le soin au pouvoir réglementaire de définir la procédure collégiale (…) sans garantir ni le caractère collégial de la décision de limitation ou d’arrêt de traitements d’un patient hors d’état d’exprimer sa volonté, ni l’exercice d’un recours suspensif contre une telle décision méconnaissent l’article 34 de la Constitution ». Ce faisant, ces dispositions priveraient de garantie légale « les exigences constitutionnelles de sauvegarde de la dignité de la personne humaine, dont découlerait le droit à la vie, de la liberté personnelle (…) et, enfin, du droit à un recours juridictionnel effectif ».

POUR APPROFONDIR – Amélie Dionisi-Peyrusse, « Actualité de la bioéthique », AJ famille, 2017, p. 218.

L’ESSENTIEL – La revue Droit de la famille consacre un dossier à « l’ accompagnement des personnes majeures vulnérables » dans son numéro de mars. Croisant les disciplines et nourris par des regards étrangers, les auteurs s’interrogent sur  la place de l’accompagnement en tant que socle de la protection des majeurs. Ce dossier se compose des dix contributions suivantes : « L’accompagnement des personnes majeures vulnérables » ; « Les implications pratiques de l’accompagnement » ; « L’accompagnement des personnes âgées vulnérables : nouveau concept juridique, nouvelle conception de la protection » ; « L’accompagnement social des personnes majeures vulnérables » ; « Accompagnement et actes personnels » ; « L’accompagnement des personnes âgées vulnérables » ; «  Accompagnement et protection des intérêts patrimoniaux » ; « L’accompagnement des vulnérabilités en droit belge » ; « La Cour de cassation espagnole et la Convention de New York relative aux droits des personnes handicapées : un nouveau paradigme » ; « La vulnérabilité à deux visages : entre soigné et soignant, entre accompagné et accompagnant ».

  • Autorité parentale et majeur protégé – Richard Ouedraogo, « Le contentieux de l’exercice par le majeur protégé de l’autorité parentale : développements récents », AJ famille, 2017, p. 173.

L’ESSENTIEL – L’article se penche sur une situation à laquelle peuvent notamment être confrontés les aidants de personnes en situation de handicap ou de maladie mentale : l’exercice de l’autorité parentale par le majeur protégé. Cette situation pose la question du délicat équilibre à trouver entre l’intérêt de l’enfant et le droit au respect de la vie familiale du majeur. Après avoir rappelé la règle du maintien de l’exercice normal de l’autorité parentale par le majeur, l’auteur souligne que l’aménagement, voire le retrait de l’exercice de l’autorité parentale sont parfois nécessaires. Ils sont alors rigoureusement encadrés. De nombreuses décisions de justice, émanant principalement de cours d’appel, viennent ponctuer sous forme d’exemples le propos.

L’ESSENTIEL – À la suite du décès de son époux ayant exercé son activité professionnelle en France, une veuve résidant à l’étranger a sollicité le versement de l’allocation supplémentaire d’invalidité (ASI). Face au refus de la Caisse primaire d’assurance maladie, confirmé par les juridictions françaises, la requérante a saisi la Cour européenne des droits de l’homme. Elle arguait du caractère discriminatoire du refus fondé sur l’article L. 815-24 du Code de la sécurité sociale soumettant l’octroi de cette prestation à une condition de résidence sur le territoire français. Examinant l’affaire au prisme de l’article 14 de la CESDH, la Cour ne fait pas droit à sa demande au motif que l’ASI a pour objectif « de garantir un minimum de ressources à des personnes qui résident effectivement sur le territoire national en fonction du coût de la vie en France ». Ainsi, il n’y a pas de discrimination puisque la veuve, résidant à l’étranger, ne se trouve pas dans une situation comparable à celle des personnes résidant en France.

POUR APPROFONDIR – Jean-Manuel Larralde, « Les autorités compétentes peuvent exiger une résidence en France pour le versement de certaines aides sociales », L’essentiel Droit de la famille et des personnes, 2017, n° 5, p. 2 ; Morane Keim-Bagot, « Condition de résidence pour l’attribution d’une allocation supplémentaire d’invalidité : pas de discrimination au sens de la CEDH », Les cahiers sociaux, 2017, n° 296, p. 263.

L’ESSENTIEL – Cet arrêt est susceptible d’intéresser les aidants qui occupent à titre gracieux un logement appartenant à la personne aidée. En l’espèce, à la suite du décès de leur mère, un enfant a sollicité en justice que son frère rapporte à la succession le montant des loyers dont il a fait l’économie en occupant gratuitement durant quatorze ans une maison dépendant de la succession. Les juges du fond ont fait droit à cette demande en constatant que les dépenses que l’occupant y avait exposées, notamment pour l’aménagement des combles, la pose de double vitrage et l’installation d’un système d’alarme, ne pouvaient suffire à constituer une contrepartie à la dispense d’acquitter un loyer dont il a bénéficié. Pour autant, la Cour de cassation casse cet arrêt au motif que les juges du fond n’ont pas constaté l’intention libérale de la défunte.

POUR APPROFONDIR – Nathalie Levillain, « Autres actualités en droit des successions », AJ Famille, 2017, p. 257.

L’ESSENTIEL – Dans cette affaire, un majeur avait été placé sous curatelle renforcée. Toutefois, non assisté lors de l’audience,  il n’avait pas été avisé de la faculté qui lui était ouverte de consulter les pièces du dossier au greffe. La Cour de cassation retient la violation du principe du contradictoire au visa des articles 16 et 1222-1 du Code de procédure civile. Ce principe implique que « chaque partie ait la faculté de prendre connaissance et de discuter de toute pièce présentée au juge ».

POUR APPROFONDIR – Ingrid Maria, « Encore une censure pour violation du principe du contradictoire », Droit de la famille, Mars 2017, Commentaires, n° 69.

  • Maintien dans le logement après le décès de la personne aidée – Cour d’appel de Versailles, 2 février 2017, n° 16/02584.

L’ESSENTIEL – En cas de décès de la personne aidée, l’aidant qui n’est pas titulaire du bail peut rencontrer des difficultés. En vertu de l’article 14 de la loi du 6 juillet 1989, le contrat de location est transféré aux ascendants, au concubin notoire ou aux personnes à charge qui vivaient avec lui depuis au moins une année à la date du décès du locataire. La Cour d’appel de Versailles s’est prononcée sur la notion de concubinage au sens de ce texte. En l’espèce, un homme, occupant sans droit ni titre le logement loué à une personne décédée, invoquait sa qualité de concubin pour se maintenir dans les lieux. Pour étayer ses dires, il produisait divers témoignages établis par des voisins ainsi que par le fils de la défunte. Les juges du fond n’ont pourtant pas fait droit à sa demande. Malgré l’assistance de la défunte au cours de sa maladie et la communauté d’habitation, le requérant ne démontre pas l’existence d’une relation stable et continue ayant l’apparence d’une vie maritale, laquelle est exigée par l’article 515-8 du Code civil. La conclusion d’un pacs ou d’un mariage peut permettre de sécuriser la situation de l’aidant.

POUR APPROFONDIR – S. D.-L., « Le concubinage n’est pas une simple cohabitation », Dr. fam., mai 2017, Commentaires, n° 92.

L’ESSENTIEL –  Un homme, placé sous curatelle renforcée pour une durée de 60 mois, conteste cette décision. Débouté par la Cour d’appel, il forme un pourvoi en cassation. La Cour de cassation casse l’arrêt rendu par les juges du fond après avoir constaté la méconnaissance des exigences du contradictoire et de nécessité. S’agissant du principe du contradictoire, la première chambre civile rappelle le droit de toute personne à ce que sa cause soit entendue contradictoirement, ce qui implique que chaque partie ait la faculté de prendre connaissance et de discuter de toute pièce présentée au juge. Or, la haute juridiction constate que tel n’est pas le cas en l’espèce dès lors qu’il n’est pas établi que le curatélaire, qui n’était pas assisté lors de l’audience, ait été avisé de la faculté qui lui était ouverte de consulter le dossier au greffe. S’agissant du principe de nécessité, la Cour de cassation rappelle que «  l’ouverture d’une mesure de curatelle exige la constatation par les juges du fond, d’une part, de l’altération des facultés personnelles de l’intéressé, d’autre part, de la nécessité pour celui-ci d’être assisté ou contrôlé d’une manière continue dans les actes importants de la vie civile ». En l’espèce, les juges du fond se sont bornés à énoncer que le curatélaire ne parvenait pas à liquider sa société ni à régler sa dette locative et que l’assistante sociale exposait avoir atteint les limites de son intervention sans constater l’altération de ses facultés mentales.

POUR APPROFONDIR – Gilles Raoul-Cormeil, « La procédure tutélaire gouvernée par les principes du contradictoire et de nécessité », L’essentiel Droit de la famille et des personnes, 2017, n°3, p. 5. 

L’ESSENTIEL – Dans cette affaire, la fille d’une majeure protégée avait disposé des avoirs de sa mère en outrepassant le champ de ses pouvoirs, antérieurement à l’entrée en vigueur de la loi relative à l’adaptation de la société au vieillissement. Pour rappel, cette loi a supprimé l’immunité pénale familiale qui bénéficiait auparavant aux ascendants, descendants et conjoints non séparés de corps dès lors qu’ils exercent une mesure de protection juridique.  Les juges du fond avaient fait application de cette loi pour prononcer la condamnation de la fille pour abus de confiance. La Cour de cassation casse et annule l’arrêt rendu par la Cour d’appel en se fondant sur les règles relatives à l’application de la loi dans le temps. La loi pénale nouvelle étant plus sévère, elle ne peut s’appliquer à des faits commis antérieurement à son entrée en vigueur.

POUR APPROFONDIR – Ingrid Maria, « Application dans le temps de la loi ASV ou quand l’abus d’un protecteur familial ne peut être sanctionné », Dr. Fam., mars 2017, Comm. 70.

L’ESSENTIEL – Le contentieux du divorce intéresse les proches aidants. En l’espèce, l’épouse a sollicité le versement d’une prestation compensatoire. Pour ordonner son versement sous forme de rente, la cour d’appel s’est uniquement référée à l’âge et à l’état de santé. La Cour de cassation casse l’arrêt au motif que les juges du fond ont méconnu les termes de l’article 276 du Code civil en ne caractérisant l’existence d’une situation exceptionnelle justifiant que la prestation compensatoire soit versée sous la forme d’une rente viagère.

POUR APPROFONDIR – Ariane de Guillenchmidt-Guignot, « Autres actualités en droit du divorce », AJ Famille, 2017, p. 202.

  •  Assistance d’une tierce personne – Thierry Tauran, « La tierce personne dans le droit de la protection sociale », RDSS 2017, p. 154.

L’ESSENTIEL – L’auteur recense l’ensembles des dispositifs prévus par le Code de sécurité sociale et le code de l’action sociale et des familles au profit des tierces personnes qui assistent des individus en perte d’autonomie.

L’ESSENTIEL – A compter du 1er janvier 2017, les donations et les successions ne bénéficient plus de la réduction de droits pour charges de famille, prévue antérieurement aux articles 780 et 781 du Code général des impôts. Pour rappel, ces textes instituaient une réduction de droits de mutation à titre gratuit en fonction du nombre d’enfants du donataire ou de l’héritier.

POUR APPROFONDIRBulletin officiel des Finances Publiques-Impôts (BOFIP), 13 février 2017.

Tarification des EHPADDécret n° 2016-1814 du 21 décembre 2016 relatif aux principes généraux de la tarification, au forfait global de soins, au forfait global dépendance et aux tarifs journaliers des établissements hébergeant des personnes âgées dépendantes relevant du I et du II de l’article L. 313-12 du code de l’action sociale et des familles, JORF, 23 décembre 2016.

L’ESSENTIEL – Ce décret s’applique à la tarification des EHPAD, des petites unités de vie et des établissements de santé autorisés à délivrer des soins de longue durée. Il vise à simplifier l’allocation de leurs ressources. D’abord, le décret « prévoit la mise en place d’un financement automatique des prestations relatives à la dépendance des résidents, reposant sur une équation tarifaire qui prend en compte [leur] niveau de dépendance ». Le Conseil départemental pourra tout de même « moduler le forfait (…) en fonction de l’activité ». Puis, le décret précise « les modalités de fixation des tarifs relatifs à l’hébergement à la charge des résidents ». Enfin, il prévoit « les modalités de financement des établissements de santé autorisés à délivrer des soins de longue durée ».

POUR APPROFONDIR – Jean-Pierre Hardy, « La réforme de la tarification et du financement des EHPAD : acte IV », RDSS, 2017, p. 339.

L’ESSENTIEL – Dans cette affaire, la question se posait de savoir si l’allocation compensatrice pour tierce personne accordée à un enfant majeur en situation de handicap et versée à sa mère devait être comptabilisée dans les revenus cette dernière lors du calcul du montant de la prestation compensatoire. Rappelons que l’ACTP a été remplacée par la prestation de compensation du handicap depuis le 1er janvier 2006. Cette somme étant destinée à compenser la perte d’autonomie et non à rémunérer un tiers, la Cour de cassation précise qu’elle ne constitue pas une source de revenus pour la mère et ne doit donc pas être prise en considération dans la fixation du montant de la prestation compensatoire.

POUR APPROFONDIR – Jérôme Casey, « L’allocation compensatrice pour tierce personne pour l’enfant majeur est indifférente pour la fixation de la PC », AJ famille, 2017, p. 201.

L’ESSENTIEL – Une mère a sollicité la mainlevée de la mesure de tutelle dont faisait l’objet sa fille. Sa demande est jugée irrecevable par les juges du fond en l’absence de production d’un certificat médical. La Cour de cassation casse l’arrêt au motif que « la production d’un certificat médical n’est pas une condition de recevabilité de la demande de mainlevée de la mesure ». Cette solution a pu surprendre au regard des dispositions législatives applicables en la matière. En effet, l’article 442 du Code civil, s’agissant des conditions de mainlevée d’une mesure de protection, effectue un renvoi à l’article 431 du Code civil. Or, ce dernier texte pose, à peine d’irrecevabilité, comme condition d’ouverture d’une mesure de protection la production d’un certificat médical.

POUR APPROFONDIR – Jean Hauser, « La production d’un certificat médical n’est pas une condition de recevabilité de la mainlevée d’une tutelle », RTD Civ. 2017, p. 97.

  • Refus illégal d’inhumer et indemnisation – TA Amiens, 2 novembre 2016, n°1400613.

L’ESSENTIEL – Suite au décès de leur père domicilié à Lucheux, ses enfants avaient demandé au maire l’autorisation de l’inhumer dans le cimetière communal. Ce dernier avait opposé un refus en invoquant le peu d’espace encore disponible. Or, aux termes de l’article L. 2223-3 du Code général des collectivités territoriales, « la sépulture dans un cimetière d’une commune est due (…) 2° Aux personnes domiciliées sur son territoire, alors même qu’elles seraient décédées dans une autre commune (…) ». Le tribunal en déduit que le refus opposé aux enfants du défunt est illégal. Il souligne, par ailleurs, que l’absence d’intention exprimée par le défunt d’être inhumé dans le cimetière de ladite commune tout comme le fait que les membres de sa famille soient titulaires d’une concession dans le cimetière d’une autre commune ne sauraient légalement justifier le refus du maire. Cette illégalité fautive a causé un préjudice direct et certain aux enfants.

POUR APPROFONDIR – « Indemnisation du refus illégal d’inhumer », AJDA 2017, p. 610.

L’ESSENTIEL – Dans cette affaire une femme, victime d’un accident de la circulation, avait assigné l’assureur de l’auteur du dommage en indemnisation. En fixant le préjudice lié à l’assistance par une tierce personne, la cour d’appel avait soustrait de ce poste l’allocation personnalisée d’autonomie en se fondant sur le fait qu’elle était déductible et destinée à indemniser la perte d’autonomie. La Cour de cassation casse et annule l’arrêt pour violation de l’article 29 de la loi du 5 juillet 1985, dite loi Badinter : « seules doivent être imputées sur l’indemnité réparant l’atteinte à l’intégrité physique de la victime les prestations versées par des tiers payeurs qui ouvrent droit, au profit de ceux-ci, à un recours subrogatoire contre la personne tenue à réparation ». L’APA n’étant pas mentionnée dans ledit article, elle ne peut donner lieu à un recours subrogatoire contre la personne tenue à réparation et ne doit donc pas être déduite  lors du calcul du préjudice lié à l’assistance par une tierce personne. La situation pourrait être amenée à évoluer, non pas pour l’APA mais pour la PCH, l’avant-projet de loi portant réforme de la responsabilité civile ouvrant un recours récursoire aux organismes débiteurs de cette prestation.

POUR APPROFONDIR – Yannick Dagorne-Labbe, « Observations sous Cour de cassation (2e civ.), 20 octobre 2016, n° 15-17.507 », Revue de droit sanitaire et social, 2017, p. 183.